Complainte à un père mort
Complainte à un père mort
Tu es parti sans un adieu
Dans un pays en haut des cieux
Où je ne verrai plus tes yeux
Regarder la croix d’un air pieux.
J’aurais préféré que tu restes,
Pour m’instruire, moi la petite peste ;
Te revoir danser dans cette veste,
Aussi vrai que je la déteste.
Mais la Dame à la Faux t’a pris,
Et je n’entendrai plus tes cris
Quand je perdrai à la Loterie
Tout l’argent que je t’avais pris.
Qu’est-ce que sera ma vie sans toi ?
Un voyage dans un monde étroit,
Une tache de café sur la soie,
Un soleil triste qui se noie…
Je reprends la manufacture,
Et tu m’as laissé ta voiture ;
Je réparerai la toiture,
Je referai toutes les peintures.
Ce sont tes dernières volontés,
Et bien sûr je les remplirai,
Aussi fort que je t’ai aimé,
Je sais qu’un jour je te suivrai :
Je partirai en haut des cieux,
Comme un voleur, sans un adieu,
Et on ne verra plus mes yeux
Te rechercher dans chaque lieu.